Jean-Marc Jacot et Parmigiani - l'action sinon rien !

Le CEO de Parmigiani n'est pas un beau parleur, c'est un homme d'action, qui suit toujours son instinct.

Tribune des Arts - Juillet 2012
Sylvie Guerreiro

Enfant, il jurait préférer se lancer dans la brosse à dents plutôt que dans l'horlogerie. Il est aujourd'hui CEO de Parmigiani, une marque au savoir-faire authentique et mondialement reconnu.

 

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“Ne parle pas, fais!” assène-t-il à ses enfants. Il est comme ça, Jean-Marc Jacot. Le CEO de Parmigiani n'est pas un beau parleur, c'est un homme d'action, qui suit toujours son instinct. Quitte à contrarier la logique commerciale. et lorsqu'il a un projet en tête, pas question de lui répondre qu'il faut attendre ou que c'est impossible. Car il a une foi inébranlable en l'homme et ses capacités. Surtout en celles de ses collaborateurs. Il sait aussi que les grandes choses ne sont accomplies que par les fous et les artistes. et c'est dans cet état d'esprit qu'est née la marque Parmigiani.

“Mon père était collectionneur de montres. Dans les années 70, aidé par Madame Landolt de la Fondation Sandoz, il a redéveloppé le Musée d'horlogerie du Locle”, rappelle Jean-Marc Jacot. Son père était alors président du Musée. Lorsqu'en 2000, la prestigieuse famille se tourne vers le “fiston” pour développer la société Parmigiani, il accepte sans trop réfléchir, se demandant tout de même ce qu'il va bien pouvoir apporter à ce “gros atelier employant une cinquantaine de personnes”. Le fait est qu'elle deviendra une véritable manufacture.

Nommé délégué aux affaires horlogères auprès de la Fondation de la Famille Sandoz − “c'est plus simple de dire CEO!” − il fait équipe avec Pierre Landolt, président de la Fondation et membre de la famille Sandoz; “un vrai entrepreneur qui voue un amour fou aux artisans”, précise-t-il. C'est alors que la société se dote d'entreprises de décolletage, d'équipement de machines et de fabrication de boîtiers, avant de s'enrichir, en 2006, de la société Quadrance et Habillage SA, regroupant les activités de production de cadrans. entre-temps, plusieurs partenariats clefs sont passés. Avec Bugatti, ce qui permettra de sortir une montre dont le cadran latéral est encore dans tous les esprits. Avec Hermès également, pour les bracelets, ou encore avec le constructeur de yachts Pershing, pour lancer des montres plus sportives.

Mais la Fondation souhaite aussi verticaliser la distribution. Elle ouvre donc le premier des sept Ateliers Parmigiani, à Istanbul, en 2010. Ces espaces exclusivement dédiés à la marque sont pensés comme un prolongement de son savoir-faire. On y vend des montres, certes, mais un horloger est là pour livrer explications et conseils avisés. Et ça, c'est très important chez Parmigiani. “Dès le départ, nous voulions créer une vraie marque et une marque vraie, sincère vis-à-vis du consommateur”, insiste le dirigeant. C'est pourquoi ici, il n'est question que de mouvements mécaniques, uniquement façonnés dans des matériaux nobles, sans aucun placage d'aucune sorte. Ce qui ne va pas sans une stratégie marketing forte, bien sûr, mais dans le bon sens du terme: “C'est une chose de faire des montres et de les vendre. C'en est une autre que de créer une marque.”


Premier stage chez Seiko, Japon

C'est pourtant ce même Jean-Marc Jacot qui, enfant, jurait à ses parents préférer se lancer dans la brosse à dents plutôt que dans l'horlogerie! L'homme est né au Locle, en Suisse. C'était en 1949. Il y restera jusqu'à ses 12 ans. “Quand on vit au Locle, on entend sans arrêt parler de montres! Moi, je voulais faire du cinéma. Mais si on rate dans ce domaine, la vie devient vite compliquée. Alors, j'ai fait du commerce.” Ce, à Paris, au Collège européen des Sciences Économiques et Sociales. et puisque tous ses copains partaient faire leur mémoire de fin d'études aux États-Unis, il s'est envolé pour le Japon, alors en plein développement, où il a fini par effectuer un stage chez... Seiko. Diable! Ne serait-ce pas de l'horlogerie?

Revenu en Europe en 1974 pour apprendre l'allemand, il rejoint Bulova, la première marque au monde à avoir fabriqué des montres électroniques. D'abord en Allemagne puis à Paris. Puis viennent les belles années passées chez Cartier (dès 1975). La maison fabrique alors 3000 montres par an. Avec le président, Alain-Dominique Perrin, qui sera le premier à définir la notion de “luxe moderne”, Jean-Marc Jacot, alors responsable de l'horlogerie, participe à la renaissance et au développement international de Cartier avec, notamment, le lancement des collections Must et Santos. Ce qui lui vaut d'être recruté par le célèbre chausseur Charles Jourdan.

Trois années s'écoulent et le revoici en Suisse. Pour un intermède chez Omega, comme directeur international des ventes auprès de Jean-Claude Biver, chef de produit, qui le conduira finalement chez Ebel, en tant que directeur marketing puis directeur général (1982-1992): “Avec Pierre-Alain Blum, le propriétaire d'Ebel, nous en avons fait la marque la plus en vue du moment, avec Rolex et Cartier. Pour cela, nous avons travaillé jour et nuit pendant 13 ans, organisant aussi des soirées incroyables avec des célébrités. Ce qui ne veut pas dire que nous avons tout changé; pour que la réussite dure, il faut préserver l'âme de la marque et ne pas penser qu'à faire de l'argent. Il y a des montres, d'un certain style, que nous refusons de réaliser pour satisfaire une demande car elles ne correspondent pas à l'esprit Parmigiani...”

Après Ebel, Jean-Marc Jacot sera encore directeur général de Gérald Genta (1993-1999) et il fondera la société Tempus Concept, exploitant la licence mondiale des montres Hugo Boss jusqu'en 2004. Aujourd'hui, notre Loclois est un homme comblé: “J'ai eu une chance inouïe et des patrons extraordinaires qui m'ont fait confiance. Je ne me suis jamais levé le matin en me disant que j'allais travailler. À présent, j'essaie de rendre la pareille.” C'est pourquoi, il ne se borne pas à encourager ses enfants à l'action. Il les pousse surtout à faire ce qu'ils aiment. “C'est la clef du bonheur.”


En 3 dates…

Mars 1968... lorsque j'ai raté mon permis de conduire!
1er mai 1978... la naissance de ma fille Géraldine
26 juin 1983... celle de mon fils Alexis

 

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Parmigiani