Une montre portée autour du cou, en version choker à l’allure rock ou avec la grâce désinvolte d’un sautoir ; une montre qui enlace la cheville ou rivée au vêtement à la manière d’une broche, flirtant avec le cœur, le festonnant d’un coup d’éclat… Irrévérence ? Provocation ? Oui, la montre est un bijou, mais elle s’en distingue pourtant par sa fonctionnalité, avec laquelle les femmes ont visiblement bien l’intention de s’amuser au fil de détournements créatifs fortement inspirés par les KOL (ndlr Key Opinion Leaders – les leaders d’opinion).
Ces derniers temps, il ne nous aura pas échappé quelques apparitions surmédiatisées de certaines stars qui semblent avoir décidé de tordre le cou aux conventions horlogères. Tout au moins sur tapis rouge. L’année dernière, au premier rang du défilé Louis Vuitton Hommes de la Fashion Week parisienne, Rihanna avait défrayé la chronique en portant une « Choker Watch tour de cou » de Jacob & Co., avant de changer son fusil d’épaule quelques semaines plus tard, lors du Grand Prix de F1 de Las Vegas, en choisissant de faire figurer une montre Jacob & Co. autour de sa cheville. À l’occasion d’un événement mondain, la youtubeuse américaine Emma Chamberlain s’était fendue d’une montre Baignoire de Cartier portée en ras de cou sur une lanière en cuir. Dans le microcosme de l’horlogerie, l’influenceuse et experte en montres Brynn Wallner, fondatrice du site Dimepiece, s’est elle aussi essayée à l’exercice en publiant sur son Insta un selfie avec une montre choker de Jacob & Co. Quant à l’indétrônable reine de la pop, Taylor Swift, elle a foulé cette année le tapis rouge des 66e Grammy Awards avec un collier montre de style Art Déco, serti de diamants noirs et signé Lorraine Schwartz.

Rock around the clock
N’est pas Rihanna ou Taylor Swift qui veut. Et ce qu’elles choisissent de porter n’est pas nécessairement transposable au commun des mortels. Mais leurs coups d’éclat, leurs frasques stylistiques et autres buzz répétés finissent par infuser notre culture et façonner notre perception de la mode ou notre manière de twister nos montres et nos bijoux. Les lignes bougent, la fluidité et la métamorphose sont de mise, les genres s’entremêlent. À nous de choisir de rester à quai ou de sauter dans le train en marche. Certaines maisons horlogères montrent d’ailleurs l’exemple. En phase avec sa stratégie disruptive, Jaquet Droz ose une communication visuelle autour d’un porté à la cheville de sa nouvelle montre Automate Rolling Stones à l’effigie de la pochette de l’album culte du groupe, Some Girls, paru en 1978. De quoi bousculer notre regard sur la montre et nous rappeler que, bien avant la généralisation de la montre-bracelet, les femmes ont porté ces bijoux mécaniques autour du cou, au doigt, sous la forme de broches ou pour souligner la taille, suspendus à une châtelaine généralement sertie de pierres pré- cieuses, finement ciselée, gravée ou émaillée.

Ivresse de la métamorphose
Entre la montre et le bijou, la frontière reste souvent ténue et quelques marques, dont les savoir-faire s’illustrent dans les deux domaines, ont dévoilé cette année des pièces magnifiques qui swinguent autour du cou. La collection de Haute Joaillerie Extrale-ganza de Piaget, dévoilée pour les 150 ans de la maison, décline notamment une bague qui donne l’heure et deux montres sautoirs transformables, à porter de trois manières différentes. Grâce à un astucieux système, le boîtier en or auréolé de diamants, de saphirs jaunes, de perles de turquoise et de malachite peut aussi bien se poser au poignet ou sur un bracelet en satin vert qu’autour du cou, suspendu à une pléiade colorée de gemmes et de pierres ornementales. Pour oublier un temps la course des heures et des minutes, il suffit d’escamoter le boîtier de la montre et de porter la création en version collier, tout simplement.
L’art de la métamorphose est l’une des spécialités de Bovet dont la montre Miss Audrey se transforme au gré des envies, grâce à son boîtier Amadeo de 36 mm. Par le biais d’un ingénieux mécanisme, la montre-bracelet peut être convertie en une jolie pendulette de table ou en un pendentif aux allures de bijou, avec sa lunette sertie de diamants et son cadran laqué vert, finement guilloché.

Une histoire de tendances
À travers ces possibilités de portés multiples, on devine parfois un clin d’œil spectaculaire à l’histoire. Chez Vacheron Constantin, la Grand Lady Kalla puise son inspiration dans le riche patrimoine de la Maison qui s’illustre depuis plus de deux siècles dans le domaine de la montre joaillière. La plus ancienne pièce sertie de la collection privée de Vacheron Constantin date de 1812 mais c’est essentiellement de l’esthétique de l’iconique Kalla de 1980 dont le bijou de lumière se revendique. 46 carats de diamants taille émeraude et des perles Akoya appairées à des perles d’onyx composent ce joyau qui propose quatre portés différents, en montre-bracelet ou en sautoir.
Puisque la tendance des montres portées à la manière d’un accessoire de mode semble se confirmer, qui mieux que Chanel pour continuer de donner l’exemple ? On observe cette versatilité sur plusieurs montres pendentifs présentées au sein de la collection capsule Chanel Couture O’Clock et de la ligne Le Temps du Lion, où figure une fantastique montre sautoir Lion Assis en or jaune, diamants et onyx. La montre Première Sound s’affiche quant à elle autour du cou, assortie d’un dispositif audio amovible, tandis que la montre Première Sautoir-Ceinture se plaît aussi bien sur un décolleté que pour souligner la taille. Un joli détournement créatif qui met en lumière l’infini champ des possibles offert par le mariage de l’horlogerie et de la joaillerie. La montre serait-elle un bijou comme les autres ?

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