Le cheval pour Hermès ? Connaissant le métier originel de la maison parisienne, sellier, il n’y a rien ici de surprenant. Si ce n’est une question fondamentale : comment arriver à perpétuellement se renouveler sur l’unique cheval, sans jamais tourner en rond comme l’équidé dans son manège ?
Pour y parvenir, Hermès a misé sur deux choses. La première : les métiers d’art. La manufacture les utilise tous, et en invente de nouveau. Sa grammaire artistique est donc constamment revitalisée, même si le sujet équestre reste identique.

La seconde : le registre esthétique par lequel il est abordé. Hermès ose beaucoup de choses : animal noble, joueur, cosmique, pour enfants, en bande dessinée, statique ou en mouvement, ultra moderne ou classique voire antique, etc. Hermès ne se refuse aucun répertoire. L’approche est déroutante. Elle pourrait semer des collectionneurs qui ne savent jamais à quoi s’attendre. Mais c’est précisément cette fraîcheur qu’ils recherchent. Le sellier laisse aux institutions horlogères le classicisme patrimonial, et revendique une irrévérence maîtrisée. Elle se déploie sur ses cinq dernières créations équestres.
Le plus cosmique : l’Arceau Chorus Stellarum
Vous voulez jouer avec la mort ? Montez sur ce cheval infernal aux côtés de son défunt cavalier. Mues par un mécanisme à ressort relié au poussoir à 9 heures, ces vanités gothiques caracolent d’un simple coup de pouce, dans une impulsion à la demande, autour d’une constellation dorée. Email champlevé, gravure, mobiles sculptés en or : on peut être un cavalier mort et apprécier les métiers d’art !

Le plus coloré : l’Arceau Costume de Fête
Lorsque l’on pense à une spécialité polonaise, le cheval vient rarement en pole position. Et pourtant : cette Arceau Costume de Fête s’inspire du folklore polonais. La pièce repose sur un dessin de l’artiste Jan Bajtlik, natif de Varsovie. On apprécie la réalisation de l’équidé en marqueterie de cuir, qui rappelle le métier de sellier d’Hermès. Des perles aux couleurs vives se forment sur une base en métal sculptée et peinte uniformément, ponctuée d’innombrables couches de micro-peinture successivement appliquées au pinceau. Des sequins (micro pièces de métal) y sont ensuite cousus de fil de cuivre.

Le plus impressionnant : Arceau Robe légère
C’est le cheval le plus simple d’Hermès et, pourtant, l’un des plus compliqués. Simple, parce qu’il ne comporte qu’une technique : l’émail paillonné. Mais la taille de ces derniers, minuscules motifs d’argent ciselés à la main et appliqués au pinceau, par centaines, rend l’exercice d’une complexité hors norme. Paradoxalement, le résultat final s’apparente plus à de la dentelle qu’à de l’émail paillonné. Un chef-d’œuvre de minutie qui a probablement exigé une patience monacale...

Le plus technique : l’Arceau Duc Attelé
Tourbillon tri-axial à répétition minutes. On voit peu Hermès afficher de telles prétentions en Haute Horlogerie. Pourtant, l’occasion était trop belle de démontrer que complications et équitation pouvaient galoper de concert.
Côté cadran, un dôme en saphir surplombe le tourbillon tri-axial et sa triple cage en titane poli miroir, façonnée en double H. L’organe réglant offre trois vitesses de rotation (en 300, 60 et 25 secondes). Évoquant la propagation des ondes sonores, le décor guilloché strié fait écho aux marteaux de la répétition minutes, sculptés en profil de cheval.
Côté fond, les rouages se distinguent par leur découpe s’inspirant des roues du « duc attelé », voiture hippomobile qui se conduit de l’intérieur. À 6h, il paraît même que certains verront la silhouette d’une tête de cheval, crin au vent...

Le plus iconique : Galop d’Hermès
Toutes les pièces précitées sont en production très limitée. Il ne faut pourtant pas oublier l’adresse au grand public qui, lui aussi, peut s’approprier une part de cet héritage équestre. Le modèle Galop d’Hermès, en collection courante, est conçu pour cela. La pièce est créée en 2019. Son boîtier reprend la forme d’étriers. Elle a récemment été présentée en petit format, en acier ou en or avec lunette sertie. Son orientation est donc plutôt féminine. Toutefois, on se plaît à imaginer cette géométrie au masculin, légèrement plus grande. Après tout, l’équitation comporte beaucoup de cavalières, mais autant de cavaliers.
