La ligne Polaris est une collection historique de Jaeger-LeCoultre. La manufacture l’a réintroduite en 2018, tirant ainsi de son sommeil cette création typique des années 60. L’idée est judicieuse. Déjà, parce que la mode du vintage appelle régulièrement les gloires passées des années 20 jusqu’aux années 60. C’est une période souvent considérée comme l’apogée du bon goût horloger : le vintage est à la mode.
Mais c’est aussi une idée pertinente car ces quelques décennies furent également celles des plus grandes découvertes géographiques, des explorations et des ascensions. En faisant revivre son icône, Jaeger-LeCoultre convoque par la même occasion la flamboyance baroudeuse des explorateurs de cette époque, partant à l’assaut de terres inconnues en chaussures de cuir, tricot de laine et moustache au vent. Or, qui dit exploration, dit voyage, et donc fuseaux horaires. L’ajout d’un worldtimer était donc attendu au sein de la collection Polaris : bienvenue à la Polaris « Geographic ».

Techniquement, le worldtimer n’est pas une complication ardue à développer. Elle peut en revanche être délicate à afficher de manière claire et lisible. Il faut pouvoir montrer, sur le cadran, un second jeu d’aiguilles heures et minutes, ainsi que les 24 villes de référence correspondant aux 24 principaux fuseaux.
Ces informations sont nécessaires pour qualifier la montre de véritable « worldtimer ». Elles ne sont toutefois pas toujours suffisantes. C’est la raison pour laquelle la Polaris Geographic va plus loin. Les 24 villes de référence sont agrémentées d’une mention graphique qui permet de distinguer celles qui appliquent l’heure d’été, de celles qui s’en dispensent. Elles se règlent par la couronne située à 10h, une asymétrie chère à la collection Polaris.
Par ailleurs, le second fuseau horaire, affiché à 6h, est doté à sa marge d’un discret guichet jour / nuit. Il permet, par exemple, de faire la différence entre 15 heures et 3h du matin, précision utile pour ne pas réveiller sa famille restée à la maison par un impromptu coup de fil au beau milieu de la nuit.

Enfin, ajoutons que le mouvement est doté de la fonction stop seconde. Cette subtilité permet d’arrêter l’aiguille des secondes lors de la mise à l’heure de la montre, ce qui garantit dans le cas d’un worldtimer d’avoir les deux fuseaux réglés avec la même précision, à la seconde près.
Esthétiquement, la Polaris Geographic offre un laquage « gris océan » peu commun. L’exercice n’est pas simple. Il consiste à déposer quatre couches de laque de couleurs différentes. Elles permettent aux nuances de gris et de bleu de s’exprimer différemment à mesure que l’on progresse vers le centre du cadran. Il ne faut pas moins de 30 couches supplémentaires de laque translucide pour protéger et rendre sa brillance à l’ensemble.

La distribution des diverses fonctions de la montre est également peu commune. L’ouverture d’un très discret guichet des villes de référence à 6h ne fera probablement pas débat. En revanche, la concentration sur la partie gauche du cadran de la réserve de marche et de l’indicateur jour/nuit peut surprendre. La partie droite du cadran est vide. Quant à la réserve de marche (70h), elle peut sembler passablement disproportionnée, quand d’autres loueront au contraire sa parfaite lisibilité.
Au final, cette Polaris Geographic de 42 mm en boîte acier affiche ce que l’on recherche le plus souvent dans une montre : de la personnalité. Elle n’est pas consensuelle. Elle adopte des partis pris, prend des risques, à l’image de son cadran marin quelque peu menaçant. Sa dissymétrie (de cadran, de couronnes) est assumée. C’est une pièce de caractère, pour collectionneurs déjà mûrs.